• Celles : un village abandonné depuis 46 ans

    Dans l'arrière-pays de Montpellier, dans l'Hérault,  tout le monde connaît le lac du Salagou et en particulier le village abandonné de Celles.

    "Ici, depuis quarante-six ans, peu de choses ont bougé et ces dix-sept maisons éventrées et ruinées n'ont jamais cessé d'attirer les curieux", explique une journaliste dans un reportage de France 3.

    Il semblerait, d’après les récits de certains habitants de la vallée du Salagou et des articles de journaux régionaux, que le projet de barrage sur le Salagou soit né dans les années 1950 et se soit concrétisé en 1959.

    Après de nombreuses joutes verbales entre partisans et détracteurs du barrage, le Conseil Général de l’Hérault décide d'en confier le projet à la Compagnie Nationale d’Aménagement du Bas Rhône Languedoc et vote le budget nécessaire à cette étude en mai 1959. C’est à cette même époque que s’est constitué un « syndicat d’intercommunalité » des propriétaires des communes impliquées dans la construction du barrage.

    Certains élus eurent vite fait de s’engouffrer dans la brèche, y voyant des intérêts économiques et politiques : faire parler de leur ville ou de leur département, donner du travail à des entreprises locales et par la suite attirer de nouvelles populations permanentes ou de passage.

    Pourtant, en dehors des politiques et des porteurs du projet, beaucoup étaient incrédules. Comment imaginer faire une réserve d’eau à partir d’un ruisseau avec lequel les habitants arrivaient péniblement à arroser leurs jardins l’été. Prévoir un tel projet était vraiment une idée complètement farfelue promise à se voir rapidement abandonnée !

    ( avant le lac )

    Le lac a ennoyé une partie des communes de Clermont-l'Hérault à l'est, Liausson au sud, Octon à l'ouest, et Celles (visible tout à gauche sur la photo) au nord. Le niveau de l'eau est à environ 140 m d'altitude. La surface du plan d'eau est d'environ 700 hectares, tandis que le volume du réservoir est égal à 102 millions de m3. Le lac est dominé par des monts et des plateaux culminant à 300 m à l'est et jusqu'à 407 m pour le Carels à l'ouest.

    L'emplacement du lac a été décidé en raison de l'imperméabilité du sous-sol, propice à maintenir le niveau d'eau. Ce sous-sol est constitué de la « ruffe », roche formée par la combinaison de sédiments argileux et d'oxydes de fer. Ces roches sédimentaires sont datées du Permien (-280 millions d'années). C'est le résultat d'un dépôt en milieu aquatique d'eau douce calme.

    A l'origine le barrage avait un double objectif :

    d’une part fournir de l’eau pour arroser les plantations agricoles en aval de l’ouvrage dans la vallée de la Lergue et de l’Hérault ;

    d’autre part écrêter les crues spectaculaires du Salagou, la plupart du temps au printemps et à l’automne.

    Le barrage et les aménagements ont été  financés par le Département et le Ministère de l’Agriculture. Par la suite, le premier objectif d’utiliser l’eau du lac pour l’irrigation a été remis en cause suite aux difficultés agricoles dûes à la concurrence de fruits et légumes en provenance d’Espagne, d’Italie, de Grèce, du Maroc. Ainsi le lac s’est tourné davantage vers des activités sportives et touristiques.

    La première étape prévoyait que le niveau d’eau arriverait à la cote 139, puis si cela s’avérait nécessaire dans un deuxième temps l’ouvrage serait rehaussé pour atteindre une cote supérieure (147). La Lergue devait apporter un débit d’eau supplémentaire pour suppléer le faible apport du ruisseau Salagou.

    Les expropriations ont été réalisées sur les prévisions hautes, ce qui explique l’abandon de certains terrains et les maisons de Celles.

    La construction de l’ouvrage et les aménagements ont commencé durant l’été 1963 et se sont achevés le 4 mars 1969 par la fermeture des vannes. Le remplissage pouvait donc commencer !

    De violents orages, au début de mars 1969 inondèrent rapidement la plaine du Salagou ; le pont qui enjambait la rivière fut recouvert et la route nationale 9 coupée. La cuvette s’était remplie au quart. De nouvelles fortes précipitations au début octobre 1969 ont poursuivi le remplissage et obligèrent les habitants de Celles à partir.

    C’est à l’été 1971 que la cuvette a atteint son niveau maximal ...

    Laissé à l' abandon, ce qui reste du village est pillé par des bricoleurs du dimanche. Et une communauté « hippie » s' y installe et  restera 3 ans.

    1980: Installation dans les locaux municipaux de M. Joseph BIENVENIDO, surnommé Bichettes, qui sans eau ni électricité ni téléphone assurera le gardiennage du village. Le vol devient moins intensif mais les maisons déjà dépouillées des tuiles, fenêtres et carrelages se délabrent rapidement.

    1984 : Installation d’un deuxième éleveur aux Vailhés sous le pression du syndicalisme agricole, et conclusion de baux emphytéotiques pour les deux familles en place, leur conférant un droit réel. C’est la première étape vers un repeuplement de la commune.

    1985-88: Réhabilitation du secrétariat de mairie, de l’église puis aménagement de deux appartements dans les logements communaux. Raccordement téléphonique et électrique. Création de l’association « sauvons Celles » par les enfants des derniers propriétaires, ayant pour objet de prouver la réalité de la vie communautaire face à un projet de rattachement de Celles à une commune voisine.

    1989 : Décision du Conseil d’Etat en faveur du maintien de statut de la commune.

    1993 : Création de l’association « toute la famille » qui prend le relais de « sauvons Celles » pour assurer la promotion et l’animation du village, Premier festival « Rock’n Ruffes l’été.

    1995 : Aménagement de la « Guinguette » proposant des animations estivales régulières par le biais de l’association « Celles la vie ».

    Février 1996 :  Le Conseil Général de l’Hérault fixe définitivement la cote maximale du lac à 139m, libérant ainsi officiellement Celles d’une menace de submersion depuis 30 ans.

    Aujourd'hui, seule la mairie a été reconstruite et ouvre ses portes une fois par semaine. Un projet de réhabilitation du village traîne depuis maintenant vingt ans. Le village en ruine risque de rester longtemps inhabité, car en réalité, c'est bien ce paysage insolite et décalé qui attire 300 000 visiteurs par an.

    Aux élections départementales de mars 2015, la commune de Celles, forte de ses 27 électeurs inscrits, s'est singularisée en accordant au second tour un score de 100% au binôme Bousquet-Rigaud : les 17 suffrages exprimés de la commune se sont tous portés sur les candidats du parti socialiste.

     

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