La mirabelle est à la Lorraine ce que l’olivier est à la Provence ...
C'est en Lorraine qu'est cultivée 70% de la production mondiale de mirabelles et 85% de la production française.
Fruit emblématique de toute une région, la mirabelle est une petite prune ronde lustrée de jaune orangé, parfois mouchetée de rouge, à la chair juteuse et sucrée.
Le mirabellier, un arbre aux branches noueuses, fait partie intégrante du paysage lorrain. Dès le printemps, saison de la floraison, les vergers se couvrent d’une multitude de blanches corolles. Et si cet arbre se retrouve en diverses régions françaises et en Europe, c’est en Lorraine, sur les sols-argilo-calcaires, qu’il se complaît le mieux.
Il existe deux variétés principales : la mirabelle de Nancy (la plus grosse) et la mirabelle de Metz, toutes deux arrivant à maturité en août.
Parmi les autres variétés : la prune mirabelle précoce et la mirabelle de Flotow (toutes deux arrivant à maturité en juillet), la mirabelle parfumée de septembre et la mirabelle double de Herrenhausen (maturité en septembre), la mirabelle tardive de Corny (maturité de fin septembre à début octobre).
Au temps joli des mirabelles, les arbres, croulant sous leur poids, sont secoués à l’aide d’une perche munie d’un crochet ou de systèmes mécaniques fixés au tracteur (les fruits tombant sur des bâches).
Le terroir de la mirabelle
- Des nuits fraîches et des journées chaudes
Après le savoir-faire des producteurs, c'est le climat qui donne aux mirabelles plus ou moins de sucre, de tendreté, un calibre, une couleur particulière…
La température d'une journée d'été en Lorraine dépasse rarement les 25° de moyenne quotidienne. Et, les nuits sont toujours très fraîches, pouvant même descendre jusqu'à -2° l'été.
Un bonheur pour la mirabelle qui a besoin de passer du chaud au froid pour atteindre sa couleur dorée, son taux de sucre optimal et arriver lentement à maturité.
Si le mirabellier a adopté la Lorraine, c’est aussi parce qu’il ne s’épanouit pleinement qu’en dessous d’une température de 25 °C. Au-delà, il commence à souffrir. Alors plus il descendra vers le sud, moins les mirabelles seront comblées de plaisir. Aussi en Lorraine, le mirabellier pousse-t-il lentement, fructifie-t-il sans excès et mûrit-il à son rythme...
La rusticité du climat lorrain est une bénédiction pour la mirabelle. Ce qui serait rédhibitoire pour les tenants d’une arboriculture intensive est un atout de taille pour les défenseurs de la qualité. En effet, le climat continental lorrain avec ses grands écarts de températures et son ensoleillement parcimonieux n’autorisent pas les records de rendement.
- Un sol argileux qui retient l’eau
Le sol lorrain est naturellement riche en argile (plus de 30%) et reçoit plus de 800 mm d'eau. L'argile est un composant de la terre qui retient l'eau. N'importe quel arbre pourrait être "asphyxié" par cette grande quantité d'eau... mais pas le mirabellier qui a de petites racines, étalées en surface, qui puisent l'air et la quantité d'eau nécessaire à son épanouissement.
Il a fallu deux siècles à la Lorraine pour offrir le meilleur de sa terre aux mirabelles. Jusqu'en 1900, la Lorraine était essentiellement une terre d'élevage et de vigne. Les sols se sont enrichis au fil des
années de matières organiques, de potasse, de phosphore, d'oligo-éléments... et même de calcium.
Aujourd'hui, toutes ces ressources font vivre les vieux mirabelliers et assurent une croissance forte aux plus jeunes.
Un peu d’histoire
L’étymologie de la mirabelle reste mystérieuse. Une hypothèse attribue l’introduction de la mirabelle au roi René (1409-1480), duc d’Anjou et de Lorraine, qui aurait planté les premiers mirabelliers à Mirabeau, dans le Vaucluse, d’où le nom.
D’autres hypothèses sont avancées : une dérivation du nom italien myrobolan (du grec myron “parfum” et de balanos “gland”, donnant par altération mirabolano, mirabella), ou bien du latin mirabilis “belle à voir”, ou encore une dérivation du nom d’un maître-échevin de Metz, nommé Mirabel (vers 1430).
Si l’hiver 1779-1780 anéantit en partie les vergers lorrains de quetschiers et de mirabelliers, ces derniers doivent leur essor spectaculaire à la destruction des vignes par le phylloxéra à partir de 1892, cette production se substituant alors à celle du raisin pour la distillation.
Car, il faut savoir qu' un édit prohibait la distillation des fruits à noyaux, afin de protéger les vignerons de la concurrence ... La crise du phylloxéra a, donc, eu pour conséquence le remplacement d’une grande partie du vignoble lorrain par les plantations de mirabelliers
De nos jours, avec une quinzaine de milliers de tonnes annuelles (16 937 tonnes en 2009), la Lorraine représente 90 % de la production française et 75 % de la production mondiale, malgré la réduction des surfaces qui sont consacrées à la mirabelle. L’essentiel de cette production est commercialisé sous forme de produits transformés : conserves, confitures, eaux-de-vie, liqueurs.
Depuis 1996, la mirabelle de Lorraine bénéficie d’une IGP (Indication Géographique Protégée).
La récolte marque le retour de grandes réjouissances, avec les fêtes de la Mirabelle, à Metz (corsos, bals, concerts), mais aussi à Bayon (au sud de Nancy) et à Nancy (au quartier des Trois-Maisons). Il existe aussi un raid de la mirabelle (succession d’épreuves sportives, au coeur des vergers des côtes de Meuse jusqu’au lac de Madine). Une maison de la mirabelle existe à Rozelieures et ce fruit a, bien sûr, sa confrérie.
Dans l’assiette
Excellent fruit de bouche, au goût délicat, la mirabelle se savoure aussi en tarte (voir tarte aux mirabelles) et dans d’autres pâtisseries (gâteau lorrain aux mirabelles, clafoutis, flan, beignet aux mirabelles), en compote et en crème dessert (crème aux mirabelles), en confiserie (confiture de mirabelles, mirabelle confite, bonbon à la mirabelle). Elle donne également un alcool réputé (eau-de-vie de mirabelle, liqueur de mirabelle) et parfume certaines bières.