• La solitude grandissante de François Hollande

    François Hollande peut remercier le général de Gaulle !

    Comme tous ses prédécesseurs, les institutions léguées par le fondateur de la Ve République le protègent contre vents et marées, contre les secousses les plus violentes et tout autant contre lui-même, ses indécisions et ses erreurs. L'on vient d'en avoir la démonstration. A trois reprises en l'espace d'un mois, en effet, l'autorité du pouvoir, en particulier présidentiel, a été soumise à très rude épreuve.

    La première séquence commence le 24 septembre, avec les déclarations incendiaires du ministre de l'intérieur, Manuel Valls, sur les Roms et leur incapacité à s' intégrer  en France, sauf exception. Deux jours plus tard, la ministre du logement, Cécile Duflot, dénonce publiquement cette remise en question du "pacte républicain" et réclame l'arbitrage du président de la République. Puis c'est M. Valls qui s'indigne, à son tour, de ces critiques "insupportables". Et il faut attendre le 2 octobre pour que M. Hollande mette un terme à cette violente empoignade. Encore se contente-t-il d'un rappel du code de bonne conduite gouvernementale, sans trancher sur le fond le débat qui déchire ses ministres.

    Le bilan est affligeant : un climat délétère, des socialistes exaspérés, l'opposition qui en rajoute, le premier ministre éclipsé et le président obsédé par la synthèse des contraires jusqu'à la pusillanimité.

    LEVÉE DE BOUCLIERS PATRONALE

    Le deuxième épisode, passé plus inaperçu pour le commun des mortels, n'en est pas moins déplorable. Le 25 septembre, le projet de budget est présenté au conseil des ministres. Il comporte la création d'un nouvel impôt sur les entreprises - une taxe sur l'excédent brut d'exploitation -, censé rapporter 2,5 milliards d'euros à l'Etat dès 2014. La levée de boucliers patronale est immédiate : c'est l'investissement qu'on assassine, s'insurge Pierre Gattaz, le président du Medef.

    L'affaire ne traîne pas : après avoir envisagé des ajustements, le gouvernement renonce purement et simplement à son projet le 6 octobre et compense le manque à gagner par un doublement de la surtaxe sur l'impôt sur les sociétes. Le bilan, là encore, est peu glorieux : un bricolage mal ficelé, une retraite éclair au premier coup de semonce et, au bout du compte, une politique fiscale confuse et mal assumée.

    Enfin, au moment même où se termine cet épisode budgétaire, s'enclenche l'"affaire Leonarda", du nom de la collégienne rom interpellée, le 9 octobre, lors d'une sortie scolaire dans le Doubs et expulsée avec sa mère, ses frères et soeurs vers le Kosovp, où son père avait été renvoyé la veille, faute d'un dossier de demande d'asile solide. Depuis, c'est devenu affaire d'Etat ou presque, condensé explosif de tous les dérèglements actuels d'un pouvoir déboussolé.

    SURRÉALISTE !

    Résumons : un Parti socialiste qui se réveille brusquement, choqué par des pratiques qu'il condamnait du temps de Nicolas Sarkosy et sur lesquelles il a fermé les yeux depuis dix-huit mois. Des "camarades" trop heureux de pouvoir, enfin, clouer au pilori l'iconoclaste ministre de l'intérieur pour faute lourde contre les valeurs de la gauche. Des lycéens démarrant au quart de tour pour   défendre l'icône Leonarda, ce qui n'est jamais de nature à calmer les gouvernements. La compagne du président, Valérie Trierweiler, qui s'en mêle. Son ex-compagne, Ségolène Royal, qui ajoute son grain de sel.

    Et pour couronner le tout, le chef de l'Etat, qui intervient lui-même à la télévision le 19 octobre pour mettre un terme à ce psychodrame, assure que cette expulsion était justifiée par la loi, promet que désormais toute expulsion sera proscrite en milieu scolaire et - d'une fatidique phrase finale sans doute destinée à montrer que la gauche n'a pas complètement perdu le "monopole du cœur" - se prend lourdement les pieds dans le tapis en offrant à la jeune Leonarda la possibilité de rentrer en France, mais seule, sans sa famille. Pour s' entendre, quasiment en direct depuis Mitrovica, répliquer par l'intéressée qu'il n'en est pas question. Surréaliste !

    Caustique, le quotidien allemand Die Welt a vu dans cet épisode "l'exemple même du talent rare de François Hollande pour prendre des décisions et les saper en même temps". En termes moins diplomatiques, disons qu'il est difficile d' imaginer rentrée plus foireuse. Et le chef de l'Etat aurait tort de penser que le bouclier des institutions lui permettra aisément d'en effacer les dégâts.

    Certes, les apparences du pouvoir sont intactes ! Le président préside, son agenda en témoigne. Le gouvernement gouverne, tant bien que mal. Le Parlement légifère à vive allure, vote la réforme des retraites, approuve les recettes fiscales et s'attaque, cette semaine, au budget de la Sécurité sociale. C'est plus sérieux, dira-t-on, que le feuilleton erratique et frénétiquement "livetweeté" de ces dernières semaines.

    Mais la réalité du pouvoir, autant que son image, est atteinte. Le sentiment qu'il n'incarne pas pleinement l'autorité de sa fonction avait déjà creusé - autant que la rude cure budgétaire administrée depuis un an et l'impuissance à juguler le chômage - un fossé profond entre le président et les Français, comme le démontrent les records d'impopularité qu'il enregistre mois après mois. Ce fossé risque de devenir abyssal si, comme il peut le craindre, l'affaire Leonarda lui a fait perdre le dernier atout dont le créditait encore l'opinion : son caractère sympathique.

    Quant aux rapports entre le président et sa majorité - non sa majorité parlementaire, à peu près muselée jusqu'à présent, mais celle de ses électeurs de 2012 -, ils risquent de se déliter ! Depuis une vingtaine d'années, la gauche a vu s' éroder peu à peu, sa base sociale traditionnelle des catégories populaires. Elle est désormais menacée de voir s' éloigner sa base morale, attachée, malgré tout, à des valeurs d'accueil et de solidarité. Et ce n'est pas la forteresse de l'Elysée qui protégera M. Hollande de cette solitude morale !

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  • Commentaires

    1
    Vendredi 25 Octobre 2013 à 08:08

    un petit coucou en ce vendredi

    Je reviendrai lire ton article car je crois qu'il va m'intéresser lol

    mais là pas le temps, je pars. Promis je reviens

    bisous à toi

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