• C'est la grève des sapins,
    Des aiguilles, des pommes de pin
    Ils veulent tous être palmiers,
    Cerisiers ou bananiers.
     
    Les sapins sont fatigués
    A la fin de chaque année
    Toutes ces guirlandes à porter
    Ca leur donne le dos courbé.
     
    Les sapins sont enrhumés
    De vivre près des cheminées
    Sans air pur sans horizon
    Enfermés dans des maisons.
     
    Les sapins en ont assez
    De faire de l'ombre l'été
    Sans être remerciés,
    Et l'hiver d'être coupés.
     
    Les sapins ont déclaré
    Que pour la nouvelle année,
    Ils se mettront en congé.
    La forêt sera fermée.
     
    Les sapins s'en vont au vert,
    Les sapins quittent l'hiver,
    Pour aller se faire bronzer,
    Au chaud sous les cocotiers !
     
    Dominique Dimey
     
     

    La grève des sapins


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  • Une découverte toute en saveurs ...

    Le Gouda qui voulait se faire plus fort que le Camembert par Mamiehiou

    En une crèmerie fuie par les allergiques,
    Dépourvus, s'il en est, de vigueur lactasique,
    Fleuraient bon deux fromages
    Qui détestaient passionnément leur voisinage.

    Chacun vantait ses dons, et se gaussait de l'autre
    Croyant qu'il avait seul l'apanage du goût.
    L'un s'étend et se vautre
    Et le second s'enfle debout.

    « Ah ! Monseigneur, vraiment, vous prenez bien vos aises ;
    Je vous vois là tout mou et tout écafoiré (1) ;
    De la tenue, que diable ! »
    L'autre de répliquer,
    Se sentant peu coupable :

    — Je ne puis me tenir, n'ayant pas une chaise ;
    Laissez-moi donc en paix, prétentieux Gouda
    Qui ne fûtes ici jamais le chef d'état.

    — Vous coulez et coulez et vous éparpillez
    Sans jamais respecter
    Le nez de vos voisins,
    Reprit du tac au tac le Hollande chagrin,
    Le Petit Suisse fuit, le Bleu perd sa couleur,
    Le Maroilles lui-même y gâche son humeur,
    Et son parfum subtil, et sa fine saveur
    Que les Chtis ont vantés avec tant de bonheur ;
    La Vache qui Riait a perdu son entrain ;
    Et moi-même, j'avoue, qui étais boute-en-train
    Avec mon habit rouge et ma peau satinée,
    Me voilà tout à coup la mine consternée.

    — Tu veux faire la loi, coquin, en mon pays ?
    Franchis donc la frontière et ne viens plus ici !
    S'exaspéra soudain le Normand fait à coeur
    Qui voulut clore ainsi le bec du chamailleur. »

    On entendait leurs cris à deux lieues à la ronde.

    Adonc, on vit frémir la mine rubiconde
    De l'agresseur ravi d'être aller un peu loin.
    Il réfléchit alors et réclama soudain
    L'aide de cestuy-là (2) qui venait d'Angleterre
    (Jadis adversaire insulaire) ;
    Sir Cheddar se leva, les tranches bien léchées,
    Qu'on eût mises au pas dans des miches tranchées ;
    Feta, toute blanche apeurée,
    Crut sa dernière heure arrivée ;
    Parmesan s'épandit en poudre polissonne ;
    Jamais on n'aurait cru que l'attaquant canonne !
    Le fracas, la fumée, même une odeur de pet
    Emplirent aussitôt l'air que l'on respirait.

    On entendit alors, pour le rassemblement,
    Une voix de Stentor, claironnant à tous vents :
    « La guerre est déclarée ! »
    L'allié de Camembert, une aide inespérée,
    Celui même boosté par le penicillium (4),
    Se déclara conjointement Dux Bellorum (5).

    Il fut ovationné par la gent fromagère
    Qui, du nouveau champion, montra qu'elle était fière.

    « Compagnon d'armes ! Fine fleur de mon armée !
    Ripaille nous ferons, la racaille écrasée,
    Déclara Camembert au renfort va-t-en guerre.
    Ainsi fait, tu ne peux que plaire !
    Sois donc prêt à marcher avec moi d'un seul pas,
    La soldatesque nous suivra. »

    Forts de vouloir laver l'outrage,
    Ils portent haut, tous ces fromages
    Qui sont les meilleurs sans conteste ;
    Ils sont bien quatre cents que les gourmets attestent.

    — Dis, n'es-tu pas le préféré des Amerloques ?
    — Je le suis, mon ami, sans aucune équivoque,
    Nous pourrions, je crois, sans bien nous déjuger
    Leur demander de nous aider.
    Et me voilà, si tu le veux, prêt à férir.
    Ma devise est : Lait de brebis ne sait mentir !
    Ainsi donc, crions tous : Sus aux envahisseurs !
    Du "Fait en France" en ce pays, sauvons l'honneur !

    Qui fût en cet instant dans ce lieu survenu,
    N'eût rien compris à la bataille,
    Et, tout éclaboussé des coups de la piétaille,
    Ne serait jamais revenu.

    --

    (1)- écafoiré : en gaga (parler stéphanois) et en lyonnais – Écraser, réduire en bouillie. Ex. Des oeufs écafoirés : des oeufs sur le plat dont le jaune s'est répandu. Cf. Dictionnaire étymologique du patois lyonnais.
    On retrouve écafoiré dans « Le vocabulaire gaga - Les gagas »

    (2)- cestuy : celui (ancien mot).
    Ex. chez Joachim du Bellay (1522-1560) dans son poème « Heureux qui comme Ulysse » (Les Regrets)
    « Heureux qui, comme Ulysse, a fait un beau voyage,
    Ou comme cestuy-là qui conquit la toison... »

    (3)-  Penicillium roqueforti : champignon dont on ensemence le lait de brebis pour faire le Roquefort.

    (4)- Dux bellorum : Chef de guerre (latin)

    Source : http://mamiehiou.over-blog.com/article-_accueil_-110264108.html

    Présentation de son blog :

    • : LE BLOG DE MAMIEHIOU - La langue française telle qu'on l'aime  De la grammaire, des exercices divers, des dictées commentées, des histoires, des textes d'auteurs, des infos pratiques...
    • : Pour tous ceux qui aiment la langue française. Son histoire, sa grammaire et son orthographe. Des dictées commentées, des exercices ébouriffants, un florilège de textes d'auteurs, etc.

    Je vous encourage à y aller, car même si ne connais pas son auteur, cela vaut le détour !


    1 commentaire
  • Un rêve qui ne s’est jamais réalisé
    Est comme une rose qui est fanée
    Le temps passe mais nos rêves demeurent
    Ils sont à la base de notre bonheur
    On fait tous des rêves dans la vie
    Et nous voulons qu’ils se réalisent aussi
    Celui ou celle qui ne rêverait jamais
    Ne serait jamais heureux tout à fait
    Son ciel serait souvent sans couleur
    Où son rosier n’aurait jamais de fleurs
    Et qu’importe s’il regardait tout là-haut
    Il y aurait toujours bien peu d’oiseaux
    Dans la vie il faudrait toujours nous rappeler
    Que pour avancer il nous faut souvent rêver
    On ne peut pas aller décrocher une étoile
    Sans d’abord nous avoir trouvé une échelle
    Même que pour goûter au fruit défendu
    Il faille avant toute autre chose l’avoir vu
    Fais alors de ta vie une longue analyse
    Et fais aussi, que tous tes rêves se réalisent

           Claude Marcel Breault - Août 2012


    4 commentaires
  • Oh ! n'insultez jamais une femme qui tombe !
    Qui sait sous quel fardeau la pauvre âme succombe !
    Qui sait combien de jours sa faim a combattu !
    Quand le vent du malheur ébranlait leur vertu,
    Qui de nous n'a pas vu de ces femmes brisées
    S'y cramponner longtemps de leurs mains épuisées !
    Comme au bout d'une branche on voit étinceler
    Une goutte de pluie où le ciel vient briller,
    Qu'on secoue avec l'arbre et qui tremble et qui lutte,
    Perle avant de tomber et fange après sa chute !

    La faute en est à nous ; à toi, riche ! à ton or !
    Cette fange d'ailleurs contient l'eau pure encor.
    Pour que la goutte d'eau sorte de la poussière,
    Et redevienne perle en sa splendeur première,
    Il suffit, c'est ainsi que tout remonte au jour,
    D'un rayon de soleil ou d'un rayon d'amour !

     Le 6 septembre 1835.

    Recueil : Les chants du crépuscule ( 1836 )


    2 commentaires
  •  A 2 H 03, il n' y a pas grand monde ....

    La nuit blanche

    La salle est bleue.

    La boisson est dorée, remplie de petites gorgées curieuses.

    Languissants, des chercheurs écoutent d’autres invités, dans une fumée parfumée.

    Dans cette tapisserie, les conversations glissent et respirent, convexes et concaves.

    La salle est rose.

    La boisson est pâle.

    Furtivement l’air devient épais.

    Un rideau dévoile, puis un autre, des rires nus,

    Applaudissements confus, parmi des ouis désireux et des nons négligents.

    La salle est rouge.

    La boisson est transparente.

    Les murs suintent.

    Les chûtes exagèrent.

    Des encouragements titubent des divans.

    Les murmures spectraux envahissent la fête.

    S’épanouissant, l’air bouillonne.

    La salle est orange.

    La boisson est finie.

    Les lys de tigre tourbillonnent le long des bêtes persanes.

    Des chapeaux melon et des jupons à fleur, de la dentelle noire et de mouchoirs en soie, demeurent, demeurent…

    Chatouilleuses et frissonnantes, les ombres vacillent.

    La salle est brune.

    Les verres vides, éparpillés.

    Débordées, les bavardages fiévreux, les chimères se couchent bas, se racontent des vérités obscures.

    Elles respirent la brûlure de l’air, devenue de la braise.

    L’air est bleu, du charbon.

    Des saphirs dans de l’eau boueuse,

    Leurs silhouettes sont noyées et oubliées.

    Les mains instinctives, emmêlées.

    La salle est grise.

    Les fenêtres sont ouvertes,

    La lumière remplit la pièce d’une brise argentée.

    Trébuchants, les oursins se réveillent de dessous les rochers, et sortent de l’eau salée.

    Somnambules, sous un ciel illuminé d’étoiles passantes.

    Chloe Douglas


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